Un parent refuse que son enfant exécute une punition (retenue de 2 heures) en contestant les faits reprochés à l’élève. Après avoir reçu et écouté le collégien et sa famille, le chef d’établissement estime légitime la punition qu’il confirme. Les parents continuent à s’opposer à cette décision et maintiennent leur position. Que peut-on leur répondre ?
La Cellule Juridique apporte les éléments de réponse suivants.
Eléments de réponse
Un arrêt de la Cour administrative d’appel de Bordeaux, rendu le 12 avril 2005, a confirmé la légalité d’une décision d’exclusion temporaire de l’établissement prise, à titre disciplinaire, par le principal d’un collège à l’encontre d’un élève, pour désobéissance de celui-ci et refus d’exécuter la punition qui lui avait préalablement été infligée.
Ci-après l’intégralité des motifs de cette intéressante décision
(En gras, apparaissent les points commentés dans la seconde partie).
« Considérant que M. X interjette appel du jugement du tribunal administratif de Toulouse, en date du 22 janvier 2002, rejetant sa demande d’annulation de la sanction d’exclusion d’un jour, prononcée par le principal du collège Pierre Darrasse à Caussade, à l’encontre de son fils qui s’était délibérément soustrait à l’accomplissement d’une retenue de deux heures, sur ordre de ses parents ;
Considérant que si M. X soutient que le règlement intérieur du collège ne définit pas les manquements pouvant donner lieu à exclusion temporaire, il ressort des pièces du dossier, d’une part, que le règlement prévoit des sanctions de gravité croissante comprenant l’exclusion temporaire des élèves, d’autre part, que les infractions peuvent être définies par référence aux obligations générales de politesse et d’obéissance des élèves envers les enseignants, les surveillants et le personnel de service ;
Considérant que la circonstance que M. X se serait lui-même opposé à ce que son fils accomplisse cette retenue, dont il contestait le bien-fondé, ne fait pas obstacle à ce que ce dernier soit regardé, dans les circonstances de l’espèce, comme ayant commis un manquement de nature à justifier, sans que soit méconnu le principe de personnalité des peines, la sanction d’exclusion décidée par le principal du collège en application des dispositions du règlement intérieur du collège ; que, par suite, M. X n’est pas fondé à soutenir que c’est à tort que par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande. »
Les observations suivantes peuvent être déduites de la teneur de ce jugement.
Il ressort, tout d’abord, des motifs retenus par la Cour administrative d’appel, que le refus délibéré d’un élève d’exécuter une punition scolaire peut valablement justifier une sanction disciplinaire, en tant que ce refus constitue un manquement manifeste aux obligations générales d’obéissance auxquelles se trouve soumis tout élève vis-à-vis des personnels de l’établissement.
Afin d’être légale, une telle sanction doit naturellement respecter le principe de proportionnalité, inhérent à toute mesure disciplinaire, et ne pas réprimer trop sévèrement des faits qui, tout en appelant une nécessaire réponse de l’institution scolaire (sous peine de voir son autorité affaiblie), demeurent, somme toute, relativement bénins.
Ainsi, au regard des circonstances de l’espèce, une exclusion temporaire d’un jour est parfaitement adaptée en tant que sanction des faits reprochés, une exclusion de huit jours l’aurait sans doute moins été.
En outre, et s’il était besoin de le rappeler, la sanction prononcée doit obligatoirement figurer au sein du règlement intérieur de l’établissement, en vertu d’un principe juridique aussi ancien que le droit pénal, celui de la légalité des infractions et des peines les réprimant (« nullum crimen, nulla poena sine lege »).
On précisera, ensuite, que le principe – tout aussi fondamental – selon lequel un individu ne peut être régulièrement sanctionné plusieurs fois pour le même fait par la même instance ou la même autorité (« non bis in idem ») n’a pas été violé ici, puisque la sanction disciplinaire ne se trouvait pas motivée par les faits ayant justifié la punition scolaire infligée à l’élève fautif, mais par le refus même de celui-ci de se soumettre à ladite punition.
On retiendra, enfin, comme l’a souligné le juge administratif, que le fait que l’élève se soit soustrait à l’accomplissement de la retenue, sur ordre de ses parents, ne peut valablement avoir pour effet d’exonérer cet élève de sa propre responsabilité, l’exécution des punitions comme des sanctions étant personnelle et, par définition, obligatoire, dès lors que ces mesures ont acquis un caractère définitif (en matière administrative, les recours gracieux ou hiérarchiques comme juridictionnels n’ont pas d’effet suspensif, sauf le cas particulier du référé-suspension).
Afin, sinon de justifier, du moins d’excuser son attitude, l’élève en cause ne pouvait donc se prévaloir d’avoir reçu un ordre parental qui, de toute évidence, était illégal (à rapprocher de l’obligation faite à tout fonctionnaire d’exécuter les ordres reçus sauf s’ils sont illégaux : le refus d’exécuter un ordre légal étant constitutif d’une faute personnelle pouvant être sanctionnée disciplinairement par l’autorité administrative compétente).
(Extrait Veille juridique, Cellule juridique SNPDEN / Direction 255, Mars 2018, J. Bacquet)
- Voir aussi la fiche Service-public.fr : “Quelles sont les punitions ou sanctions applicables au collège ou au lycée ?”